© Antoine Boureau

Nature en ville : vive le jardin des rigolards !

Dans les Pentes de la Croix-Rousse, à Lyon, la mairie du 1er arrondissement met à disposition des écoles de son périmètre un vaste jardin clos. Pour certains petits citadins, c’est un premier accès à la nature (presque) sauvage.

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« Vous allez voir, c’est pas bien grand, mais pour eux, c’est une montagne ! »

Isabelle Berger enseigne en maternelle, à l’école Michel Servet, à Lyon. Sa classe mêle petite et grande section. Par groupes de deux, ses élèves marchent main dans la main sur le trottoir, suivis de près par les « moyens-grands » de Nolwenn Turcas. Depuis le début de l’année scolaire, toutes les trois semaines, les deux classes passent la matinée du vendredi au jardin. Aujourd’hui, comme c’est la dernière visite de l’année, un pique-nique est même prévu. Encore faut-il marcher jusque là-bas, en traversant la Croix-Rousse d’un bout à l’autre. L’aventure commence par cette randonnée urbaine. Ça monte, ça descend, ça remonte. Bus, camion-poubelle, voitures... le trafic est dense entre les immeubles. « Certains sont toujours en poussette et marchent très rarement, ça se voit ! » constate Isabel, l’une des deux ATSEM (agent territorial spécialisé des écoles maternelles) qui accompagnent la sortie. Il faut 35 à 40 minutes aux petites jambes pour atteindre enfin l’objectif : le jardin des Rigolards ! Avec un nom pareil, comment ne pas emporter l’adhésion des enfants ?

En sécurité pour prendre des risques

Isabelle Berger en a la clé. Elle ouvre la porte grillagée, avant de la refermer derrière le dernier élève. Le jardin appartient à la commune, mais ce n’est pas un lieu public. La rue et ses dangers sont inaccessibles. Une fois à l’intérieur, les enfants sont libres d’aller où ils veulent – les adultes ne donnent pas de consignes. Mélanie et Isabel, les deux ATSEM, gardent en mémoire les premières visites, en septembre : « ils n'osaient pas s’éloigner de nous. Peu à peu, ils ont pris leurs repères et ont compris qu’ils pouvaient prendre des initiatives. » Aujourd’hui, personne ne se fait prier. Ça court, ça court ! Dans la pente (on est à Lyon !), se laisser entraîner par sa vitesse semble grisant. Rami, un petit garçon tout fluet, chute plusieurs fois, toujours au même endroit. Il se relève et repart de plus belle. Son ATSEM l’observe : « Au début, il n’aurait jamais fait ça. Et si sa maman était là, il ne courrait pas, parce qu’elle aurait trop peur pour lui. » Quant aux plus grands, « ils réapparaitront pour le pique-nique, philosophe l’enseignante. Ce sont un peu les ados de la maternelle ! »

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Le jeu libre

« Ici, ils ont le droit. » Tel est le mot d’ordre adopté par l’équipe. Le droit de prendre des bâtons, le droit de se salir, de grimper aux arbres, de courir, de ramasser des cailloux, de rester là à rêvasser. Les seuls interdits : faire mal aux autres et abîmer la nature. Entre certains arbustes, des chemins se sont tracés, à force d’être empruntés par tous les écoliers de l’arrondissement. Les racines des arbres forment comme des échelles. D’autres recoins, délaissés, conservent leurs sous-bois intacts. Un robuste lierre de Perse subit les assauts d’une grappe d’enfants. Ils sont bientôt six, juchés sur ses branches souples. « Regarde, je fais le cochon pendu ! » Puis soudain, comme une volée de moineaux, tous s’enfuient ailleurs : « Venez voir ma cachette ! » Fatoumata a juste le temps de glisser : « J’adore escalader, j’adore sauter très haut ! » Un groupe de fillettes transvase des cailloux avec concentration : « On fait une soupe à la fraise empoisonnée. » Ah ? Empoisonnée, mais pourquoi ? « Parce qu’on est des sorciiiiiières ! »

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Un temps à part

Pour les ATSEM comme pour les enseignantes, le bénéfice de ces matinées est global : se déplacer et se repérer en ville, puis dans un espace de nature, gagner en motricité, en confiance en soi. L’année précédente, Nolwenn Turcas a pratiqué l’école dehors avec des enfants de CE2. Elle compare : « En primaire, ils ont besoin qu’on donne un sens scolaire aux sorties. » Avec les élèves de maternelle, « on peut se contenter d’être là, ça leur apporte suffisamment. Certains n’étaient jamais venus dans un lieu naturel et ne connaissaient que le béton ! Ils arrachaient toutes les plantes au début. » Elle apprécie aussi d’avoir plus de temps pour les observer chacun avec attention : « On les voit différemment, ici. » Et elle saisit les occasions qui se présentent pour consolider des apprentissages : « J’en ai profité pour faire de la numération avec un de mes élèves : donne-moi un caillou, donne-moi deux cailloux... » L’air de rien, le jardin des Rigolards, c’est du sérieux !

Photographies © Antoine Boureau

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